Témoignages chrétiens

Le secret du bonheur
Odile Delcambre


Focolari
Hedwig Reyntjens


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Le secret du bonheur
Odile Delcambre



L'Evangile permet d'entendre chaque jour
que Dieu parle
On y trouve le secret du bonheur.

Sans lui, je perdrais le nord !

La place de l'Evangile dans ma vie religieuse? Mais il emplit mon horizon ! Complètement. Je ne me vois vraiment pas vivre sans lui. Je perdrais le Nord. Il donne sens à mes journées, à mes joies, à mes amitiés, à mes peurs, à mes séjours à l'hôpital, à la mort de mes amis, de mes parents. L'Evangile, c'est un Roc. Sans lui, ma vie n'a plus de sens.

Comme je ne suis ni théologienne, ni intellectuelle, les passages d'Evangile dans lesquels je refais mes forces, dans lesquels je trouve sens à ce qui paraît insensé, sont ceux où je vois Jésus vivre, rencontrer les gens, aimer en acte. Je pense à la Samaritaine, aux disciples d'Emmaüs, au lavement des pieds, aux guérisons de l'aveugle-né ou du paralytique. Souvent Il ne dit que peu de mots. Il aime, Il agit. Quelques brève paroles ponctuent ses gestes. C'est tout.

Mais Le Livre nous révèle, à longueur de pages, le secret du bonheur, ce bonheur que nous cherchons tous, souvent en nous trompant d'adresse ! Les pubs qui envahissent les stations de métro, les carrefours, les écrans de télévision, sont tellement trompeuses : « Employez la crème Truc pour rester jeune et belle ». Mais on peut être jeune et beau sans être heureux ! On peut aussi être heureux sans être jeune et beau. « Dorez-vous au soleil de Vanuatu ». Si vous y êtes isolé, hargneux, haineux, sans amis, les vacances ne seront pas formidables.

L'Evangile au quotidien

Non, non. Le bonheur que Dieu veut pour chacun de nous, ce n'est pas là qu'il faut le chercher. Il est ailleurs. «  Aimez-vous les uns les autres. Faites du bien à ceux qui vous persécutent ». A l'expérience, c'est vrai que là, et là seulement, se trouve la joie en profondeur, même s'il faut passer par des moments pas faciles à vivre, quand on a plus envie de mordre que de sourire. Mais c'est payant !

Je me souviens du jour où, excédée par les bêtises commises par une de mes soeurs, je la trouve en train de démonter le fourneau sous prétexte de le nettoyer. Elle avait déjà « nettoyé » l'aspirateur - devenu inutilisable - et détraqué la tondeuse à gazon. Je fulminais et je l'aurais giflée ! Je lui ai offert une « algarade maison ». Mais c'était l'heure de la messe. « Puisque c'est comme ça, je ne vais pas à la messe, » me lance la soeur furieuse. Elle me tourne le dos et disparaît. Bon, qu'est-ce que je fais ? J'entre dans la chapelle où l'Evangile est grand ouvert sur le lutrin : «Aimez-vous! ». Aïe ! Aïe ! Aïe ! Confusion. Honte.

Mais la porte s'ouvre, la sSoeur entre avec un peu de retard. « Au moment de se donner la paix, j'irai l'embrasser, » pensé-je. Mais elle a la même idée. Et voilà que lorsque le célébrant annonce : «  Donnez-vous la paix! », nous fonçons l'une sur l'autre. Elle est très vive. Moi aussi. Carambolage spectaculaire au milieu de la chapelle. Ahurissement du prêtre. Et fou rire magistral de la communauté. C'était il y a plus de 20 ans. Quand nous nous retrouvons, nous en rions encore : « Tu te rappelles le fourneau ? » Ainsi l'Evangile modèle le quotidien. Pas seulement devant les grandes décisions à prendre.

Se laisser bousculer

Pas besoin d'avoir fait Sciences Po pour comprendre l'Evangile. Il suffit d'ouvrir Le Livre, de lâcher prise et de se laisser bousculer par le message formidable qu'il contient. J'y passe du temps. Chaque jour, je lis le texte proposé par la liturgie : Qu'est-ce que Dieu veut me dire aujourd'hui ? Ce qu'il veut me dire, c'est toujours nouveau !

Cela dépend de ce qu'on vit, des rencontres qu'on fait, de son état de fatigue ou de paix. Le même texte lu vingt, trente fois, révèle toujours quelque chose de nouveau. J'aime ouvrir Le Livre avec un esprit curieux, sûre qu'il contient quelque chose de spécial, pour moi, aujourd'hui. Je n'ai jamais été déçue. Et quand je vis des circonstances douloureuses ou quand la télévision nous informe de drames : déchaînement de haine, violence, crimes sordides, viols, tsunamis, accidents catastrophiques, famines, je relis Jean au chapitre 16 : « Dans le monde vous trouverez la détresse. Mais ayez confiance, moi je suis vainqueur du monde  ». Cela ne supprime pas la souffrance, mais cela permet de ne pas perdre pied.

Quelquefois, l'Evangile ne nous dit pas ce qui nous fait plaisir : c'est tellement exigeant ! Et on a envie d'aller voir ailleurs. Aimer ses ennemis , laver les pieds - c'est-à-dire renoncer à son petit prestige - oser se montrer avec des gens de renommée douteuse - je pense à Marie Madeleine, à la Samaritaine - faire confiance à des gens mal vus : Matthieu, releveur d'impôts soupçonné de s'en mettre plein les poches. Et finalement donner sa vie pour les autres. Vite dit, mais dans la pratique ! Je ne peux lire et me laisser pétrir que dans la prière : «Je suis si loin de tout ça, Seigneur. Toi seul peux me modeler selon ta volonté. »

Un amour fou

L'Evangile me révèle surtout et avant tout que Dieu nous aime au-delà du « raisonnable ». Le larron crucifié à côté de Jésus n'est sans doute pas très recommandable pour être là. Mais il lui suffit d'un mot d'amour pour que Jésus lui affirme : « Ce soir même, tu seras avec moi dans le paradis ». Quelle espérance quand on prend conscience de sa propre indignité et quelle consolation quand on perd un être cher !

Ceux qui n'ont pas la chance d'avoir eu la révélation d'un Dieu qui nous aime d'un amour fou sont perdus, broient du noir, dépriment. Je les prends dans ma prière : c'est aussi une façon - ma façon - d'aimer.





Focolari
Hedwig Reyntjens

Une expérience d'Evangile
à travers un mouvement qui s'appelle «Focolari».
Ce mot italien signifie
«petits foyers de lumière».



La règle d'or

L'origine du mouvement des Focolari remonte à 1943. En plein coeur de la deuxième guerre mondiale, dans la ville de Trente, au Nord de l'Italie, les bombardements étaient intenses. Tous les projets s'écroulaient. Aller chercher quelqu'un à la gare, entreprendre des études, autant de tâches impossibles ! On ne savait pas s'il fallait faire face à l'avenir ou à la mort. Dans cette situation limite, Chiara Lubich s'est demandé : « N'y a-t-il pas d'idéal qui ne puisse être détruit ? » Et elle comprit : « Seul Dieu ne peut être détruit  ; et l'Ecriture est le moyen qui nous reste pour l'atteindre. »

Réfugiées dans les abris anti aériens plusieurs fois par jour, pendant les bombardements, Chiara et ses amies se lancent dans la lecture de l'Evangile. Le chapitre 17 de St Jean les a particulièrement frappées et soutenues. Là, Jésus a prié « pour que tous soient Un ». Dans un monde où tout s'écroule et se déchire, prendre conscience de cette prière de Jésus change le regard. Elles comprennent que vivre pour l'unité conduit à aimer chacun, à aimer en prenant les devants sans attendre, à vivre en aimant l'autre comme soi-même. C'est ainsi que le petit groupe se met à vivre de cet idéal.

Ces jeunes filles découvrent une dimension universelle : l'amour est un idéal proposé dans toutes les religions. Cette règle d'or « fais à autrui ce que tu voudrais qu'on te fasse », se retrouve en islam et dans les grandes religions du monde. Au fil des mois, le groupe s'agrandit, trouvant en Jésus crucifié et abandonné la mesure pour aimer chacun, pour dépasser la souffrance et la destruction, pour créer des liens surnaturels et reprendre sans cesse le chemin de l'unité.

Le mouvement des Focolari est maintenant présent dans tous les pays. Il s'affirme dans les différents domaines de la vie : dans l'économie, la politique, le sport, les loisirs. Il met à la base de toute activité cette «  règle d'or » de l'amour, conscient que cela peut transformer les personnes, les relations, renouveler le milieu de travail, le milieu de vie, etc.

Des paroles à vivre

Chiara Lubich et les membres du premier groupe, au tout début, ont pris en main l'Evangile pour lire la Parole de Dieu. Ils ont découvert que les mots de l'Evangile n'étaient pas des lettres mortes, mais des paroles à vivre. L'originalité des Focolari consiste à 'vivre' le texte plus qu'à le méditer ou l'étudier. On a pour habitude de prendre une parole du Nouveau Testament chaque mois. Celle-ci était commentée par Chiara Lubich jusqu'à sa mort récente, le 14 mars dernier. A chacun ensuite de mettre en pratique cette parole et de voir ce qu'elle produit en nous. Il s'agit aussi de faire part à d'autres de cette expérience que chacun fait et ainsi d'élargir l'espace où Dieu se donne en Jésus. Grâce à ce mouvement, j'ai découvert que c'est le Christ lui-même qui est vivant à travers sa parole, si nous la mettons en pratique. C'est lui aussi qui nous permet, par sa parole, de donner la vie aux autres. Cette mise en pratique de la parole de Dieu permet la présence de Jésus au milieu de nous.

On était invité, au mois de juin, à découvrir l'Esprit Saint et à voir comment il nous rend libres et nous rejoint dans notre vie. S'il y a des décisions à prendre, « Là où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté  » (2 Co. 3,17). Quelqu'un avait un poste important aux Nations Unies qui rendait la vie difficile pour sa famille. On lui proposait d'aller dans un autre pays pour y prendre un poste important, ce qui était une promotion. Il s'est bien gardé de répondre à cette proposition alléchante ; il a réfléchi avec son épouse ; il a laissé cette parole - «Là où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté» - faire son travail en lui. Et, à cette lumière, il a compris qu'il devait refuser ce nouveau poste afin d'être plus disponible pour les siens. S'il a pu, guidé non par le désir de réussir une carrière mais pour aimer ses proches, renoncer à cette promotion, c'est grâce à l'Esprit, qui avait opéré en lui un travail de libération.

Le plus petit d'entre les miens

Je peux aussi vous livrer un témoignage personnel, vécu il y a quelques années. La parole qui nous avait été donnée à vivre était : « Ce que tu auras fait au plus petit d'entre les miens, c'est à moi que tu l'auras fait  ». J'étais jeune prêtre ; on m'avait demandé d'aller visiter les paroissiens hospitalisés, en particulier dans une maison spécialisée pour des malades d'Alzheimer ou des personnes en soins palliatifs. Lorsque j'y allais, je savais que les rencontres qui m'attendaient seraient vraiment des rencontres avec Jésus.

La première personne que j'ai visitée s'appelait Claire. Une infirmière était auprès d'elle. Claire n'avait plus de visite : elle ne réagissait plus à rien et n'éprouvait plus aucun sentiment. La première réaction de l'infirmière, en me voyant, a été la surprise. Elle m'a demandé de l'aider à redresser Claire dans son lit ; on l'a soulevée en la tenant chacun de son côté. Peut-être le fait d'entendre une voix inhabituelle, peut-être le fait de percevoir l'appui de mon bras ont provoqué une réaction. Elle s'est tournée vers moi, elle a ouvert les yeux et m'a fait un très beau sourire. L'infirmière a été très surprise car Claire avait cessé d'avoir des réactions depuis longtemps. Elle m'a regardé droit dans les yeux. Je ne pouvais pas échanger avec elle : elle avait quitté depuis longtemps l'univers de la parole. J'ai tracé une croix sur son front ; elle s'est endormie et je l'ai quittée. Elle était vraiment pour moi, grâce à la parole, « le plus petit d'entre les siens ».

Vous m'avez visité

Le soir, en rentrant chez moi, j'ai téléphoné à un ami prêtre, lui aussi membre des « Focolari ». Je lui ai raconté la scène et celui-ci m'a répondu   : « As-tu compris qu'avant que tu ne la bénisses, son sourire avait été la bénédiction de Dieu pour toi ? » Je cite cette conversation avec cet ami prêtre pour montrer que l'expérience que nous faisons de la parole doit être partagée. L'expérience de ces échanges que nous avons entre nous fait partie du travail que fait en nous la parole évangélique. Quand nous vivons ainsi, la présence de Dieu grandit au milieu de nous.

Chiara Lubich a défini ainsi les caractéristiques de l'amour chrétien : d'abord, il s'agit d'aimer chacun, sans exclure qui que ce soit ; sans exclure nos ennemis. L'amour ne s'arrête pas aux membres de notre famille ou des êtres qui nous sont chers. Il s'agit aussi « d'aimer en premier », sans attendre que l'autre fasse preuve de bienveillance à notre égard.

Et puis, comment et jusqu'où aimer ? L'amour va jusqu'à être prêt à donner sa vie pour l'autre. Aimer comme Jésus a aimé, c'est-à-dire vivre hors de soi pour entrer dans les joies, les douleurs, les peines de l'autre ; vivre pour lui tel qu'il est et tel qu'il se présente à moi.

Reconnaître Jésus crucifié

Aimer, dans l'esprit diffusé par Chiara Lubich, c'est également reconnaître et aimer Jésus abandonné et crucifié, dans chaque souffrance, qu'elle soit petite ou grande, et cela toujours, immédiatement et avec joie.

La « règle d'or », évoquée plus haut, permet de nous retrouver, chrétiens et musulmans. « Fais à autrui ce que tu voudrais qu'il fasse pour toi. » Ce principe est aussi présent dans la religion musulmane et dans les grandes traditions religieuses. Cette valeur commune, si nous la faisons nôtre, peut nous rapprocher. Lorsque Chiara Lubich a été interpellée, pendant la guerre, par la parole de Jésus   - « Qu'ils soient un » -, elle a compris qu'il s'agissait de tous les hommes, quels qu'ils soient.

Pour connaître les focolari



Oeuvres de Dominique Mehdi Doulain

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