Le départ de Monseigneur Sabbah

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Nommé il y a 20 ans par Jean-Paul II, Mgr Sabbah a désormais atteint la limite d'âge (75 ans). Il sera remplacé par l'évêque coadjuteur du patriarcat, Mgr Fouad Twal, né en Jordanie, âgé de 67 ans. Dans un entretien, publié par le site de la Custodie de Terre Sainte, Mgr Sabbah dresse un bilan de la situation et évoque ses projets pour l'avenir. En voici quelques extraits.

Béatitude, quel est votre message aux Israéliens et aux Palestiniens en cette veille de Pâques?

Les Israéliens veulent la sécurité et veulent la paix ; les Palestiniens veulent leur indépendance, leur sécurité également et la paix. Et ils sont capables d'y arriver. Il y a beaucoup d'oppositions pour des raisons idéologiques, pour des raisons politiques, à cause de la peur de la paix. Selon moi, le principal obstacle à la paix, c'est la peur de la paix.(...) En Israël, la paix est un risque que les Israéliens pensent prématuré de prendre. Maintenant, choisir la paix peut être un risque pour la vie personnelle du chef signataire d'un accord de paix. Mais si vraiment un chef politique est là pour servir son peuple et non pour garder son siège, il doit accepter ce risque de donner sa vie pour son peuple.

Quand vous avez rencontré Monsieur Olmert [avant Noël], avez-vous eu le sentiment qu'il y avait une volonté politique ?

Monsieur Olmert a une véritable volonté politique. Il est décidé à faire la paix mais, comme il l'a dit, il rencontre des obstacles. C'est donc à lui de convaincre son opposition, alors nous aurons la paix.

Quels sont ces obstacles ?

L'extrême droite, les extrémistes religieux, le parti religieux qui estime que toute la terre doit rester israélienne et qu'aucun pouce de cette terre ne peut être remis aux Palestiniens Et les religieux ont un pouvoir politique, ils ont des sièges à la Knesset. Voilà l'opposition avec laquelle M. Olmert doit traiter.

Vous avez dit que le monde arabe était prêt à normaliser ses relations avec Israël. Mais nous ne pouvons pas ignorer et Israël ne peut pas ignorer que le Hamas continue de refuser de reconnaître Israël ? Par ailleurs l'islamisme monte dans les pays arabes.

Hamas existe. Le Hezbollah existe. Ils sont une menace. Mais ce qui fait exister le Hamas et ce qui le fait augmenter, c'est cette situation de guerre dans laquelle il y a des injustices, il y a la pauvreté et il y a la misère et tant que cette situation existera, il y aura toujours le Hamas et toutes ses déclarations et sa volonté d'en finir avec Israël. Mais lorsqu'une paix sérieuse, définitive se fera, Hamas et Hezbollah finiront par diminuer et perdre leur influence. Il y aura toujours des extrémistes du côté palestinien comme du côté israélien mais ces partis seront réduits à une minorité sans influence sur l'avenir du pays. Si l'on fait la paix, les extrémistes finiront pas diminuer et les gens n'auront plus besoin d'eux.

Estimez-vous qu'Israël devrait parler au Hamas ? Le dialogue devrait-il se faire avec le Hamas aussi bien pour Israël que pour les Etats Unis et l'Union Européenne ?

Israël, l'Union Européenne, la communauté internationale doivent parler avec l'Autorité palestinienne et accepter que l'Autorité palestinienne se réconcilie avec le Hamas. Mais dès que le Hamas entre dans le gouvernement palestinien, la communauté internationale boycotte tout ce qui est palestinien. Il s'agit de reconnaître à l'Autorité palestinienne la possibilité de renouer une alliance car la paix ne peut pas se faire seulement avec une partie du peuple palestinien. Il y a plus d'un million et demi de personnes à Gaza. Il faut compter avec cela. Donc il faut que les deux groupes se réunissent, deviennent une seule réalité palestinienne représentant ensemble la volonté palestinienne pour que la communauté internationale et Israël même puissent faire des accords de paix. Mais tant que Hamas est sujet au boycottage et si, dès lors qu'il entre au gouvernement, c'est tout le peuple palestinien qui est boycotté, nous sommes dans une impasse.

Quand vous avez rencontré Abou Maazen [Mahmoud Abbas], lui avez-vous conseillé de rouvrir le dialogue avec le Hamas ?

C'est notre conseil. Il faut regrouper les deux parties du peuple palestinien. Maintenant cette alliance dépend non pas seulement d'Abou Maazen mais de la communauté internationale. Une fois la réunion faite, le Hamas ayant droit à faire partie du gouvernement, la communauté internationale va boycotter tout le monde de nouveau.

Quel conseil donnez-vous à la communauté internationale ?

De laisser tranquilles les Palestiniens, de leur permettre de se regrouper et d'agir ensemble, tout simplement. Et si jamais il y a le Hamas dans le gouvernement palestinien, qu'elle respecte la volonté palestinienne.

Quel va être votre rôle après votre départ ?

L'évêque a trois fonctions : sanctifier, enseigner et administrer. Avec la retraite, l'administration échoie à un autre, restent les deux tiers sanctifier et enseigner. Donc il y aura beaucoup de choses à faire là encore.

Allez-vous donner à votre mission un rôle plus politique ?

Pas plus politique mais plus chrétien. Mais un chrétien qui mettra le pied dans le plat politique. Parce que la politique ici, c'est la vie humaine. Ce n'est pas une politique de partis, de gauche, de droite, ce sont des vies humaines qui sont menacées. Que ce soit les Palestiniens ou les Israéliens. Ce sera donc la continuation de l'engagement pour toute personne humaine dans ce pays, Israéliens et Palestiniens à la fois.

Propos recueillis par Marie-Armelle Beaulieu


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