Nous avons reçu de nombreux courriers de chrétiens nous disant :
Avez-vous jamais lu le Coran ? Prenez, par exemple, la sourate 9,29 :
«Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu ni au Jour dernier,
ceux qui ne déclarent pas illicite ce que Dieu et son prophète ont déclaré illicite ; ceux qui, parmi les gens du Livre,
ne pratiquent pas la vraie religion. Combattez-les jusqu'à ce qu'ils payent directement le tribut après s'être humiliés.»
Jacques Berque fait remarquer que cette prescription est tardive ; elle abroge donc toutes les précédentes prescrivant
de ne parler aux gens du Livre qu'avec la plus extrême courtoisie ou la fameuse phrase si souvent citée :
«Pas de contrainte en la religion»
(Sourate 2,1). De même, il ne faut pas se laisser abuser par la phrase qui rend hommage aux chrétiens : « Tu reconnaîtras...que ceux qui sont
les plus proches des musulmans par l'amitié sont ceux qui disent « Nous sommes chrétiens ». C'est parce qu'ils ont des prêtres et des moines
qui sont exempts d'orgueil » (Sourate 5, 82). Ces propos ne sont-ils pas contredits, voire abrogés par ceux-ci:
« Que Dieu les combatte ! Comment à ce point se fourvoyer ! Ils se donnent pour maîtres leurs docteurs et leurs moines
en place de Dieu (et font de même) du Messie, fils de Marie...Soyez sûrs que beaucoup de docteurs et de moines mangent
dans la fausseté les biens des ouailles et interceptent le chemin de Dieu... Combattez les « associants » de la manière qu'ils
vous combattent : sans distinction.» (Sourate9)
Ces textes ont justifié les pires conquêtes : en Palestine, au Maghreb, en Espagne, aux Balkans ou en Europe centrale.
Aujourd'hui ils justifient les pires massacres des chrétiens. Vous vous êtes insurgés les uns et les autres, contre les massacres
des chrétiens dans la cathédrale de Bagdad. Les musulmans devraient se rappeler que ces sacrilèges sont justifiés par le Coran et
les chrétiens devraient prendre conscience qu'en nouant des relations impies avec les disciples de Mohammed, ils se font
les alliés objectifs d'une entreprise d'islamisation mondiale qui éteindra l'Eglise.
Aux musulmans, nous demandons de nous expliquer comment ils interprètent ces textes. Ont-ils l'intention
d'islamiser la France ? Comment se fait-il que, dans une société laïque, ils multiplient les signes d'appartenance
musulmane : exigence de nourriture hallal pour les enfants à l'école, djellaba dans les rues de nos villes, voiles
ostentatoires pour les femmes, pour ne pas parler de la burqa, banques islamiques.Partant de la Mecque, vous vous êtes
imposés à tout le monde connu et , sous prétexte de les protéger, vous avez fait des chrétiens des « dhimmis »,
autrement dit des citoyens de seconde zone écartés du pouvoir. Comment voulez-vous qu'on ne soit pas inquiet devant
vos activités militantes en Europe?
Aux chrétiens, nous demandons d'ouvrir les yeux. Ne voyez-vous pas que nos racines sont chrétiennes et que
l'identité française est en danger ? Comment pouvez-vous regretter la souffrance des chrétiens vivant dans les pays arabes
et apporter de l'eau au moulin d'un islam qui broie l'Eglise au point de la réduire en poussière ? La laïcité, au début
du XXème siècle, a été dure pour l'Eglise ; elle a expulsé les religieux hors de France ; elle interdit, encore aujourd'hui,
aux prêtres et aux religieux ou religieuses d'accéder à des fonctions publiques. L'anticléricalisme n'est pas mort ;
on se moque de la morale chrétienne qui a forgé la société européenne et vous prenez la défense de comportements
musulmans qui changent le visage de la France.
Réponse
de "La Maison Islamo Chrétienne"
Il faut reconnaître que la lecture des Ecritures saintes est un problème aigu qui pose des questions graves non seulement
aux musulmans mais aux chrétiens. On pourra toujours manipuler les textes saints. Les versets du Coran correspondent à des
circonstances bien précises qui n'ont rien à voir avec la situation, aujourd'hui en France. Les chrétiens de « La Maison
islamo chrétienne », pour leur part, s'insurgent de l'interprétation que certains font de la Bible. On prétend souvent
que le retour des Juifs en Israël est voulu par Dieu et on s'appuie sur une promesse faite à Abraham voici plus de 20 siècles.
On justifie par la parole du Seigneur des tribulations imposées aux populations arabes, juives ou chrétiennes. Nous prétendons,
pour notre part, qu'il faut cesser de recourir à des arguments bibliques pour analyser une situation de politique
internationale particulièrement cruelle. Cette forme de fondamentalisme a quelque chose de blasphématoire. L'avènement
de la Justice et de la paix, en christianisme, est le critère à partir duquel se manifeste le sens des textes saints.
Le recours à l'histoire est-il indispensable pour faire face à la situation française d'aujourd'hui ? Oui,
l'islam et la chrétienté se sont affrontés au Proche-Orient et au Maghreb. En réalité, un royaume latin s'est
imposé par la force et la violence pour des prétextes religieux en 1099. Les chroniqueurs, nous rapportant les
événements, décrivent la sauvagerie des croisés et leur mépris de l'adversaire. En revanche tous sont d'accord pour
reconnaître la noblesse de Saladin lorsqu'il chassa l'occupant en épargnant les populations chrétiennes. Oui, l'islam a
détruit la chrétienté florissante du Maghreb mais la colonisation dont les effets pervers n'ont pas encore disparu, n'est-elle
pas tout autant regrettable ? Certes, la situation de Dhimmis n'est plus guère soutenable depuis que l'humanité a inventé la démocratie.
Mais, reconnaissons que l'islam a su inventer un système permettant une convivialité réelle pendant des siècles entre juifs, chrétiens
et musulmans. En revanche, lorsqu'au 17ème siècle, le « Mayflower » transportait vers le Nouveau-Monde des puritains fuyant
la persécution, se préparait un régime d'apartheid qui contraste avec la cohabitation interethnique du Proche-Orient où juifs,
musulmans et chrétiens ont toujours cohabité jusqu'au début du 20ème siècle.
Prendre prétexte des massacres de chrétiens à Bagdad pour stigmatiser l'islam de France procède d'une étroitesse d'esprit qu'il faut
dénoncer. Les chiites sont autant menacés que les chrétiens ; par ailleurs lorsque les uns ou les autres sont la cible d'Al-Qaïda,
c'est le tissu social irakien tout entier qui est déchiré. S'il est vrai que les chrétiens, dans la plupart des pays musulmans,
sont soumis à rude épreuve, la raison est sans doute à chercher dans la politique internationale actuelle plutôt que dans
une lecture littéraliste du Coran.
Accueillir en France une religion nouvelle ne peut porter atteinte à l'identité française, s'il est vrai que la France est
Terre d'asile. Reconnaissons que la laïcité a été difficile à accepter au moment de la Séparation de l'Eglise et de l'Etat.
Aujourd'hui, elle fait partie de notre identité ; on ne pourrait sans se renier soi-même regretter que plusieurs millions
de croyants ne soient pas reconnus dans la Patrie des Droits de l'homme. Leur interdire d'affirmer leur identité serait
un refus de la diversité et conduirait au totalitarisme. La rencontre d'autrui, lorsqu'elle est désintéressée, s'avère facteur
de civilisation On sort du christianisme quand on en fait une force de repli.
On n'oublie pas où a conduit l'antisémitisme occidental. Le remplacer par l'islamophobie serait aussi dangereux. Plus que jamais
il convient de se rappeler l'enseignement du Concile. D'abord la Constitution sur l'Eglise (« Lumen Gentium ») :
« Le dessein
de salut enveloppe également ceux qui reconnaissent le Créateur, en tout premier lieu les musulmans qui professent avoir la foi
d'Abraham, adorent avec nous le Dieu unique, miséricordieux, futur juge des hommes au dernier jour. »
Et le décret conciliaire sur
les religions non chrétiennes contient un appel aux fidèles des deux religions :
«Si, au cours des siècles, de nombreuses dissensions
et inimitiés se sont manifestées entre les chrétiens et les musulmans, le Concile les exhorte tous à oublier le passé et à
s'efforcer sincèrement à la compréhension mutuelle, ainsi qu'à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes,
la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté. »
Saâd ABSSI, Mohammed BENALI, Christine Fontaine, Michel Jondot.