Ces réflexions proches de la méditation, voient dans l’art une rencontre entre le réel le plus concret et le mystère de Dieu.
Devant le sourire de ma mère jeune, celui de la Joconde s’efface.
C’est dire qu’il y a des degrés dans l’amour, et l’amour le plus relatif doit s’effacer devant le plus élevé, le plus élevé étant celui de l’amour envers le divin. Car l’art pourrait risquer de devenir une idole. Et n’est-ce pas ce qui a l’air de se passer en Occident où les églises se vident alors que les musées se remplissent ? Alors René Char peut s’exclamer : « Toute la place est à la beauté ». Toute ? C’est alors la doctrine de l’art pour l’art par laquelle l’art peut aller dans tous les sens.
Alors quelle place donner à l’art, à la peinture ? Pascal s’étonne :
« Quelle vanité que la peinture qui attire l’admiration par la ressemblance des choses dont on n’admire point les originaux ». Alors que Hegel avance : « Le beau artistique est plus élevé que le beau dans la nature ».
Ne faudrait-il pas dire plus simplement avec un contemporain : « L’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art » ? Et sur le plan moral, Madame de Staël : « Ce qui est vraiment beau est ce qui rend l’homme meilleur ». Ses buts divers d’aujourd’hui, nous font tourner la tête : provoquer, distraire, dénoncer, manipuler, faire rire. On s’amuse :
Un balais, un seau, une serpillère avec un écriteau : « la Joconde est dans l’escalier ». Cette drôle d’installation n’est pas si bête : Elle nous invite à découvrir le beau dans notre vie quotidienne. « Les choses, quand on les regarde avec soin embellissent ». Cela nous invite à sa recherche, à la découverte de ces moments de grâce, cadeaux du ciel, jusqu’à parvenir à l’émerveillement et : « Dieu, c’est quand on s’émerveille ».
Un proverbe arabe dit dans ce sens : « La beauté est dans l’œil qui regarde ». Et « La beauté de Dieu n’est pas un secret : elle est gravée sur toutes les fleurs, sur la mer et sur les monts. Dieu est immense, il suffit de regarder le cosmos ». C’est également l’ultime but qu’on attribue à l’art, à la peinture : révéler l’invisible dans le visible. Si je sais vraiment « voir » mon regard contient déjà l’éternité. La beauté est alors pédagogie qui nous achemine au Créateur, source de toute beauté, car lui-même Beauté parfaite. Et il est logique qu’il ait créé en nous des créateurs, à son image. Toute homme peut créer de la beauté autour de lui. Ne serait-ce qu’en agençant sa demeure avec goût, s’il le peut.
Enfin, la beauté ne peut être un échappatoire qui nous déconnecterait de toute la réalité. C’est pourquoi nous devons maintenir « Une main sur la beauté du monde, l’autre main sur la souffrance du monde, les deux pieds dans le devoir du moment présent ».
Bernard Folliet