Histoire de prophètes et de poètes
Michel Jondot
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Ne désespérons pas ! Résistons !
L’expérience d’un certain nombre de personnes nous rappelle que nous ne sommes pas impuissants face au mal.


« La parole a pris chair »

Une tâche surhumaine est à notre portée ! Qu’est-ce à dire ? Il faut bien le reconnaître, le croyant de bonne volonté est au rouet. Doit-il se résigner à une marche de l’histoire qui ressemble à une danse macabre ? Doit-il, en attendant pieusement une éternité bienheureuse, traverser la vie, aveugle ou indifférent aux déchirures de son temps ? Ce serait de la lâcheté. Doit-il, au contraire, rejoindre le camp des rebelles au risque de se salir les mains ou de perdre sa vie ? L’histoire qui nous précède nous l’enseigne : toute révolte entraîne une violence qui, au terme de cruels affrontements, aboutit à une situation plus malheureuse que la précédente.

Entre la soumission passive qui conforte la puissance des chefs et les révolutions qui entraînent des temps de violences sanglantes, les croyants des religions monothéistes découvrent une troisième voie : celle des prophètes. Il est faux de dire que l’islam est violent. Dans une prédication tellement vigoureuse qu’il affirmait être conscient qu’elle venait de Dieu, le prophète de l’islam prenait la défense des pauvres en fustigeant la rapacité des riches. Sans recourir à la violence, à La Mecque sa parole était l’écho du Seigneur auquel il croyait ; elle se déployait en arrachant les pauvres à leur esclavage pour créer avec eux la cité de Médine afin que la justice, quelque part, règne à la place de l’argent.

Il avait été précédé par les prophètes de l’Ancien Testament qui, aujourd’hui encore, alimentent la réflexion du peuple juif. Le prophète Amos, huit siècles avant la venue du Messie, lui aussi avec force dénonçait la violence faite aux pauvres par les riches : « qui vendent le juste à prix d’argent et le pauvre pour une paire de sandales, parce qu’ils écrasent la tête des faibles sur la poussière du sol et qu’ils font dévier la route des humbles. » A une époque où les tribus luttaient les unes contre les autres pour se disputer la suprématie, le prophète Isaïe parlait de cannibalisme face à l’affrontement d’Ephraïm contre Manassé et de l’alliance des deux contre Juda : « Ils ont dévoré la chair de leurs propres bras ! » Le prophète Jérémie reprit plus tard la même image à l’heure où Nabuchodonosor allait déporter à Babylone les élites du pays de Judas.

La parole de ces prophètes ouvrait la voie à celle de Jésus. Le chrétien décèle, dans sa personne, ses actes et ses discours, la force du Verbe qui depuis les origines traverse l’histoire : « Au commencement était la parole et la parole était avec Dieu et la Parole était Dieu… Et la parole a pris chair. » Jean résume en ces termes son expérience de disciple de Jésus. La parole tourne des sujets les uns vers les autres. Un groupe d’hommes, autour d’un charpentier, ont perçu, dans la foi, un homme de chair et d’os tourné en même temps vers le Père des Cieux et vers ceux qui, sur la terre, venaient à lui pour le suivre ou pour qu’il soulage leur misère. Ce corps a fait miracle. Traversant la mort il s’est avéré vivant ouvrant le champ de la parole pour ceux qui croyaient en lui. « Allez dans le monde entier, ouvrez-vous au monde entier, parlez ‘à temps et à contretemps’. » Il s’agit alors d’appeler à la conversion mais non pour renforcer le nombre des adhérents à une religion nouvelle. Le mot « conversion » désigne étymologiquement l’acte de se retourner ; le disciple de Jésus a pour mission de se tourner vers autrui partout où une voix humaine appelle, et d’abord la voix de ceux qui n’en peuvent plus et dont la souffrance est un cri. En entrant dans cet entretien, le croyant est tourné vers un Père dont le visage lui échappe.

Il est bien vrai, il faut le souligner, que l’Église a été, elle aussi, comme les djihadistes d’aujourd’hui, facteur de violence. L’inquisition a fait des ravages. Pour sauver ses privilèges en de nombreux pays l’Église a fait alliance avec des dictateurs, plutôt que de se tourner vers « les joies et les espoirs » de ses contemporains (Gaudium et spes). Après avoir été dépossédée de son pouvoir sur les nations, elle tente d’imposer sa morale à tous les hommes. Tout cela est peut-être vrai. Reste qu’en elle demeure le souvenir du miracle de la Résurrection. Elle croit que la parole, lorsqu’elle n’est pas mensonge, continue à travailler l’histoire. Elle croit aussi qu’elle est appelée à la conversion, comme tous les hommes et avec eux. Quand elle réussit à se faire entendre en vérité – le Pape actuel manifeste que c’est possible – elle est fidèle à sa vocation prophétique.

Ne soyons ni sourds ni aveugles. Les prophètes ne sont pas morts. Il en est, non seulement dans toutes les religions, mais aussi partout dans le monde. Il n’est pas difficile de reconnaître le sillage tracé par tant d’artisans de paix, connus ou inconnus.


Les prophètes ne sont pas morts

Regardons ceux qui parlent ; écoutons leurs propos. En ce qui concerne les drames de notre temps qu’alimentent certains musulmans, on sombrerait dans de graves illusions sur l’islam si on n’entendait pas les voix de tant de fidèles qui sont l’écho du Coran bien plus que ne le font les cris de guerre des djihadistes. Après l’assassinat du Père Hamel, par exemple, ils sont nombreux dans notre pays ceux qui ont protesté contre les auteurs de pareille violence. Inversement, dans une histoire récente, devant les massacres de l’armée française contre les populations colonisées, des hommes et des femmes, qu’ils soient chrétiens ou non, ont pris des risques en dénonçant le comportement de leur pays. On se souvient des paroles de certains personnages bien connus comme Mauriac ou Massignon, pour ne citer qu’eux. Bien des citoyens plus modestes ont pris des risques. A titre personnel, je garde le souvenir ému d’un de mes amis, maintenant disparu. Nul ne parle de Jobic Kerlan ; pourtant sa vie est tout entière message de fraternité. Prêtre de la Mission de France à Souk-Ahras lors de la guerre d’indépendance, il s’est voulu solidaire de son environnement musulman en un temps où on y comptait de nombreux militants du FLN, tout en refusant pourtant de prendre les armes avec eux. On l’incarcéra jusqu’au jour où, le conflit terminé, les Algériens reconnurent en lui un véritable frère. On parle trop peu de ces jeunes Israéliens qui refusent de porter les armes afin de protester contre le sort cruel que leur pays impose injustement au peuple palestinien. Ils sont les dignes héritiers du Prophète Jérémie qui, lui aussi, fit l’expérience de la prison.

Comment un peuple comme la France où l’on comptait encore beaucoup de chrétiens lorsqu’elle partait à la conquête de l’Algérie, pourrait-elle oublier la grandeur d’âme d’Abdel-Kader qui se refusa à mépriser ses ennemis ? Il alla jusqu’à sauver du massacre les chrétiens de Damas, victimes des Druzes ?

Ne disons pas que le sacrifice de ces personnes est inutile. Au cœur d’un siècle qui enfanta des monstres, la parole humaine a fait preuve d’efficacité. En Inde à un moment où les castes asservissaient les plus faibles, les intouchables, à un moment aussi où les sujets du Royaume britannique se prenaient pour les Maîtres, à un moment enfin où Hindous et musulmans se faisaient une guerre qui aboutirait à la naissance du Pakistan, un homme a su dire « non » sans verser une goutte de sang. La révolte a sa noblesse : elle refuse une histoire qui fait des esclaves soumis à leurs maîtres. Mais la révolte est dangereuse : les révolutions qu’elle engendre manquent souvent les objectifs visés. En revanche la parole humaine, quand elle devient prophétique, fait naître l’Espérance. Gandhi a su écouter les plaintes de ces musulmanes à qui on interdisait de faire un pèlerinage. Il n’hésita pas à se joindre à elles dans leur marche jusqu’au tombeau d’un saint, accompagné du rythme des sourates psalmodiées. Ses discours ont mobilisé les foules au point que le peuple tout entier, faisant face aux nécessités de la vie en boycottant les produits du colonisateur, contraignait le Royaume-Uni à lâcher son pouvoir, laissant les Indiens enfin maîtres en leur pays.


Martin-Luther King
sa parole a fait l’admiration du monde

Il est dangereux de vivre en prophète : Gandhi, au terme d’une vie où il avait connu six ans de prison, fut lâchement assassiné par un opposant politique, le 20 janvier 1948, alors qu’il s’en allait rejoindre un groupe de prière. Martin-Luther King connut un sort semblable sur un autre continent. Dans une Amérique où les Blancs refusaient de rencontrer les hommes et les femmes à la peau noire, où les premiers se considéraient comme les maîtres des autres qu’ils parquaient souvent dans des bidonvilles en des conditions de vie inhumaines, ce Pasteur protestant, apôtre de la non-violence, prit des initiatives géniales. Par exemple, dans les bus de la ville de Montgomery, en Alabama, comme dans les autres villes des Etats-Unis, les places réservées aux Blancs étaient interdites aux Noirs. Loin de faire appel à la violence pour manifester son indignation, il demanda à ses frères de couleur de boycotter ces moyens de locomotion. Il mettait ainsi en danger une entreprise de transports. Sa parole a fait et continue de faire l’admiration du monde entier : qui n’a jamais lu ce magnifique discours prononcé le 28 août 1963 à l’occasion d’une longue marche vers Washington pour réclamer l’emploi et la liberté ; il s’inspire des prophètes bibliques, retrouvant les accents d’Amos ou d’Isaïe. « I have a dream : je fais le rêve qu’un jour chaque vallée s’élèvera et chaque montagne sera aplanie…Tous les enfants de Dieu pourront chanter avec un sens nouveau le chant connu – ‘Que de chaque montagne retentisse la liberté’  – » En se référant encore à la Bible et à Moïse qui avait conduit son peuple jusqu’aux frontières de la Terre promise sans pouvoir y pénétrer, le 3 avril 1968, devant une foule, il prononçait une sorte d’hymne à la joie et à l’Espérance : « Je veux juste accomplir la volonté de Dieu. Et il m’a autorisé à grimper sur la montagne ! Et j’ai regardé autour de moi, et j’ai vu la terre promise. Je n’irai peut-être pas là-bas avec vous. Mais je veux que vous sachiez ce soir, que nous, comme peuple, atteindrons la terre promise. Et je suis si heureux ce soir. Je n’ai aucune crainte. Je n’ai peur d’aucun homme. Mes yeux ont vu la gloire de la venue du Seigneur ! » Il tomba sous les balles d’un fanatique le lendemain ! Mais, là encore, la mort n’a pu étouffer la force de la parole. Le peuple américain tout entier, devant l’événement, par-delà toutes les différences raciales, vécut dans l’unanimité un jour de deuil. Bientôt les droits que Martin-Luther King revendiquait furent octroyés par le Président Johnson. Il est reconnu, par son pays, comme un héros national. Alors que l’état du monde pourrait nous conduire à désespérer, son histoire invite l’univers entier à reconnaître la noblesse de notre condition humaine.


Nelson Mandela fit naître l’espérance

Quand l’époque de Luther-King approchait de sa fin, une aventure semblable se déroulait dans un autre continent. L’Afrique du Sud était elle aussi déchirée par un apartheid pire que celui des Etats-Unis. Un homme de couleur, une fois de plus, s’y est illustré. La condition faite à ses frères était inhumaine. Il a rejoint tous ceux qui, comme lui, s’indignaient devant cette situation. Nelson Mandela, tout en veillant scrupuleusement à refuser la violence dans chacun des deux camps, fit naître l’espérance dans le camp des opprimés en réclamant l’égalité des droits et en dénonçant la misère faite à la population noire ; c’est pourquoi il fut arrêté le 5 août 1962, condamné à perpétuité aux travaux forcés, échappant de peu à la condamnation à mort. Il rejoignait ainsi 100 000 autres victimes d’un régime barbare. Malgré les apparences, cet échec était une victoire. Une conscience internationale se forgeait devant cette politique inhumaine si bien qu’à la mise à l’écart de Mandela succédait la lutte des Nations-Unies contre la politique de l’apartheid ; partout dans le monde on s’indignait devant ces politiques de mépris de Droits de l’Homme. De nombreux états prirent, à l’égard de l’Afrique du Sud, des mesures qui furent une lourde gêne pour l’économie du pays. Sans doute pour céder aux pressions internationales, il fut libéré en 1990 après vingt-sept ans de bagne et de prison. « J’aurai atteint plus de 70 ans, disait-il alors, pour avoir l’occasion de voter. » Porté à la Présidence par les citoyens et citoyennes de toutes origines, il réussit à assurer à la fois le redressement économique de son pays et la paix sociale.

De cette histoire on doit rapprocher celle de deux contemporains : deux serviteurs de la parole, un homme d’Eglise et un musulman, Monseigneur Desmond Tutu et Farid Esack.

Prix Nobel de la Paix en 1984, Desmond Tutu fut le premier évêque noir de l’Eglise anglicane. Celle-ci voulut soutenir cet homme de Dieu dans une prédication en faveur de la justice sociale. Sa parole était assez forte pour convaincre un nombre important de ses contemporains. Il alimentait sa pensée dans ce qu’on appelle « théologie de la libération ». Dans le même temps, un jeune théologien musulman puisait à la même source. Farid Esak était né en des régions arides, près du Cap, où une loi d’apartheid parquait les hommes de couleur, Noirs ou Indiens. Avec sa famille, réfugiée en Afrique du Sud pour échapper aux violences de la guerre indo-pakistanaise, il connut une enfance misérable dont il a fait le récit. En ce lieu, il grandit au milieu des populations noires, chrétiennes pour la plupart ; il y fit l’expérience que, par-delà les clivages confessionnels, la solidarité des pauvres était une véritable planche de salut. Ce gamin des bidonvilles s’est avéré particulièrement intelligent au point qu’une bourse lui permit d’aller étudier au Pakistan. Il découvrit avec stupeur que les minorités chrétiennes de ce pays n’étaient pas moins opprimées que ses compatriotes de couleur en Afrique du Sud. Il fut frappé par l’espérance qui habitait quelques condisciples : ils trouvaient dans l’Evangile des clés pour faire face aux oppresseurs et chercher, sans violence, les chemins de la libération. Il s’efforça, de retour au Cap, de lire le Coran de la façon dont il en avait reçu le témoignage chez ses condisciples chrétiens. Parole de Dieu, le Livre Saint devait, à lui aussi, ouvrir les portes d’un djihad non violent. Avec quelques amis, en 1982 il lance un mouvement : « L’appel de l’Islam » (The call of Islam) dont les principes sont puisés à un courant qu’on appelle « Théologie de la Libération ».


« La théologie de la libération »

Qu’est-ce donc que « La théologie de la Libération » ? En 1968 tous les évêques d’Amérique latine se réunissaient à Medellin, une ville de Colombie, pour regarder ensemble la situation de ces pays où la liberté était violemment réprimée, où les écarts entre les riches et les autres étaient abyssaux et où la pauvreté ravageait les peuples. Ils trouvèrent dans la pensée d’un jésuite du Pérou, l’aliment dont ils avaient besoin pour faire face à ce climat de violence et ce mot de « théologie de libération » pour le désigner. Ils organisèrent les communautés chrétiennes dont ils avaient le souci de telle sorte que par petits groupes, les pauvres se concertent, regardent, en méditant l’Evangile, la situation qui leur est faite et inventent les moyens de vivre non seulement dans la paix mais dans la dignité. De belles figures prophétiques se sont alors manifestées. Au moins deux noms sont à citer. D’abord celui qu’on appelait l’évêque des bidonvilles, l’archevêque de Recife au Brésil, Dom Helder Camara. Il avait quitté un évêché luxueux pour habiter au milieu des déshérités. Il faut souligner également le courage de Monseigneur Romero au Salvador face à un climat de violence que lui-même a décrit dans une lettre à Paul VI.

« En moins de trois ans, plus de cinquante prêtres ont été attaqués, menacés ou calomniés. Six qui ont été assassinés méritent d’être considérés comme martyrs. Certains ont été torturés, d’autres expulsés du pays. Des sœurs ont été également persécutées. La radio de l’archidiocèse, des institutions éducatives catholiques ou d’inspiration chrétienne ont été attaquées, menacées, intimidées ou ont subi des attentats à l’explosif. Plusieurs communautés paroissiales ont fait l’objet de «raids». Si tout cela s’est produit à l’encontre des personnes représentantes de l’Église, on peut imaginer ce qui a été fait aux chrétiens ordinaires, aux paysans, aux catéchistes, aux délégués et aux communautés de base . [...] Mais il est important de remarquer pourquoi l’Église est persécutée : Ce n’est pas tous les prêtres ou n’importe lequel d’entre eux. Ce n’est pas toutes les institutions ou n’importe laquelle de ces institutions. Est attaquée ou persécutée cette partie de l’Église qui s’est mise aux côtés du peuple et se pose en défenseur du peuple. Ici aussi, se trouve la même clé d’explication de la persécution de l’Église : les pauvres. »

Le 23 mars 1980, dans sa cathédrale, il eut l’audace de prononcer, dans un sermon, ces paroles de prophète : « Un soldat n’est pas obligé d’obéir à un ordre qui va contre la loi de Dieu. Une loi immorale, personne ne doit la respecter…  » Le lendemain, 24 mars 1980, comme autrefois Gandhi et Martin-Luther King, il tombait sous les balles qui l’atteignaient pendant qu’il célébrait l’Eucharistie.


La parole fait des poètes

La parole qui fait des prophètes fait aussi des poètes. Leurs œuvres ouvrent les yeux et les oreilles. Le plus grand des poètes français Victor Hugo,selon André Gide, a fait voir la misère des victimes du monde industriel de son temps en créant les personnages de Fantine et de Cosette. Peut-être Robert Badinter n’aurait pas mené sa campagne contre la peine de mort s’il n’avait été précédé par l’auteur des «  Contemplations ». On ne peut séparer l’histoire de la Résistance en France contre les Nazis sans entendre la voix de René Char pour qui le refus de l’oppression était la condition pour accéder à la beauté. On se souvient d’Eluard  : « Et par le pouvoir d’un mot / Je recommence ma vie/ Je suis fait pour te connaître / Liberté. » On se souvient d’Aragon qui chantait la solidarité dans les combats contre l’occupant, entre « Celui qui croyait au ciel et celui qui n’y croyait pas ». La poésie pénètre dans les prisons pour sauver l’espoir ; Nelson Mandela, pour soutenir le moral de ses codétenus, avait coutume de réciter le poème de Wenley « Invictus » :

« Dans la nuit qui m’environne,
Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Je loue les Dieux qui me donnent
Une âme à la fois noble et fière.

Prisonnier de ma situation,
Je ne veux pas me rebeller.
Meurtri par les tribulations,
Je suis debout bien que blessé.

En ce lieu d’opprobre et de pleurs,
Je ne vois qu’horreur et ombre.
Les années s’annoncent sombres,
Mais je ne connaîtrai pas la peur.

Aussi étroit soit le chemin,
Bien qu’on m’accuse et qu’on me blâme,
Je suis le maître de mon destin,
Le capitaine de mon âme. »

Mahmoud Darwich est mort mais ses vers chantent sur les lèvres des Palestiniens dans les prisons d’Israël :

« Ici, aux pentes des collines, face au crépuscule et au canon du temps
Près des jardins aux ombres brisées,
Nous faisons ce que font les prisonniers,
Ce que font les chômeurs :
Nous cultivons l’espoir. »

Nous sommes tous des êtres de parole, tout particulièrement nous musulmans ou chrétiens puisque c’est le lieu où Dieu nous rejoint. Ne cachons pas ce trésor dans un vase fermé, n’ayons pas peur de parler. Même si notre rôle dans la société est modeste, même si nous ne sommes pas de grands Prophètes nous avons là une antidote à la violence.

Michel Jondot


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