Es-tu salafiste ?
Christine Fontaine
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Il est difficile de comprendre le comportement
de ces femmes voilées des pieds à la tête.
Il nous a pourtant semblé que nous devions les écouter.


Photos prises dans notre local à la Caravelle
("Mes-tissages" - la Maison islamo-chrétienne)


Femmes de banlieue

Le local de notre association « Mes-tissages » se situe dans une cité à Villeneuve-la-Garenne. Des femmes d'origine européenne en côtoient d'autres, d'origine maghrébine ou africaine. Elles tissent ensemble, boivent le thé, s'interrogent sur leurs manières de vivre différentes. On apprend à se connaître et à s'estimer dans un climat de grande liberté. On essaye aussi de résoudre les problèmes de la vie quotidienne : des papiers à remplir, la recherche d'un logement, des démarches à faire. Michel Jondot est le spécialiste des solutions inextricables à résoudre. Avec Saad Abssi ou Mohammed Benali, ils sont toujours les bienvenus dans le local. Ils sont à peu près les seuls hommes à pouvoir y entrer. On ne chasserait pas les autres mais ils hésitent à franchir la porte.

On rencontre, dans ce local, des jeunes musulmanes non voilées habillées à l'européenne, d'autres en jean et portant un petit foulard, d'autres avec un bandana et certaines avec un voile et un habit très ample : le jelbeb. Ce voile ne couvre pas tout le visage mais il est de couleur très sombre et enveloppe tout le corps. Fatima, employée par notre association, sait créer un climat de convivialité entre toutes. Pour ma part, je suis entrée, pour la première fois de ma vie, dans ce monde essentiellement féminin, il y a une douzaine d'années. J'ai été surprise par la liberté de paroles de ces femmes entre elles. Nous sommes devenues vraiment amies et je sais que ce sera toujours pour elles une joie de m'accueillir chez elles.

«Jelbeb» : une question

Les demandes de mariages mixtes entre personnes cultivées vivant en France, augmentent. Pourtant, il semble que, dans une cité de banlieue comme la Caravelle , à Villeneuve la Garenne, il y ait de plus en plus de femmes voilées. Beaucoup de jeunes filles ne portaient pas le voile il y a 10 ans ; aujourd'hui les cadettes n'imitent pas les aînées. Il nous a semblé, par ailleurs, que le nombre de femmes portant le jelbeb était en augmentation dans la cité. Intrigués par ce phénomène, nous avons cherché à comprendre. Nous avons demandé à parler aux trois ou quatre d'entre elles qui fréquentent notre association. Elles ont accepté.

En ce jour de début février 2010, Michel Jondot - prêtre catholique - et moi, chrétienne, sommes dans le local de Mes-tissages. Ce jour là, il n'y a pas d'autres « Français » comme on dit, bien que plusieurs d'entre elles aient la nationalité française. Une quinzaine de femmes s'affairent, certaines sur un métier à tisser, d'autres sur une machine à coudre. Nous nous installons avec trois femmes portant de jelbeb autour d'une table. En elles, rien d'ostentatoire. Plutôt, au début, une certaine retenue car elles ne sont pas sûres de pouvoir être comprises. Le lendemain elles diront avec joie : « Nous avons été respectées !» Il est vrai qu'elles sont vraiment dignes de respect mais souvent difficiles à suivre pour des chrétiens et aussi pour beaucoup de musulmans. Elles le savent ; c'est pourquoi elles ont fait preuve d'un réel courage. Elles n'ont cherché à convaincre personne, ni les musulmans présents ni les chrétiens. Elles ont parlé d'elles, de leur foi, de leur vie.

Nous vous faisons participer à cette conversation le plus fidèlement possible. Le thé à la menthe est servi... Trois femmes portant le jelbeb - Saïda, Khadidja et Leïla - sont avec Michel et moi. Par la suite, deux femmes non voilées, une jeune portant un bandana, et d'autres - en jean ou en jupe longue portant un simple voile de couleur - se mêleront à la discussion.


Un choix réfléchi

Christine F : As-tu toujours porté ce voile sombre qui t'encadre la tête et recouvre tout ton corps ?

Saïda : Quand je suis arrivée de Tunisie en France, je ne mettais pas de voile du tout. J'ai lu le Coran et j'ai vu que les femmes devaient être voilées. C'est un choix. J'ai réfléchi et je me suis sentie poussée à mettre le jelbeb. Je le fais simplement pour l'amour d'Allah.

Dans le Coran on dit qu'il faut mettre cette sorte de voile qui cache complètement les formes de la femme. Je ne pourrais pas mettre un jean et un petit foulard ; je sais que ce n'est pas ça. Mais je ne critique pas les autres. J'ai lu le Coran et je connais la Sunna. Je veux suivre vraiment la religion. Je sais qu'il ne faut pas mettre non plus de hauts talons ni avoir du maquillage.

Michel J : Les musulmans ont les cinq piliers de l'islam. Mais pour toi il semble que ce voile- là soit un sixième pilier.

Saïda : Le jelbeb est marqué dans le Coran. Pour le Ramadan, les musulmans doivent le faire seulement s'ils ne sont pas malades ; mais pour le jelbeb il n'y a pas d'exception. Pour moi une musulmane pratiquante fait la prière, met le voile, suit les cinq piliers. Le Livre va jusqu'à la fin du monde. Il faut le suivre comme c'est écrit.

Après mon arrivée en France

Une femme en pantalon qui porte un petit voile de couleur intervient :

J'étais au Maroc et je ne portais pas le voile. Personne, ou presque, dans mon village ne le portait. Mais depuis l'âge de 15 ans je me disais qu'il fallait que je le mette. Je l'ai fait peu après mon arrivée en France. Des femmes avec qui j'ai travaillé m'ont expliqué que c'est dans le Coran. A partir de ce moment je l'ai mis. Maintenant au Maroc aussi on porte le voile, bien plus qu'avant. Avant les gens étaient ignorants sur la religion. Aujourd'hui tout le monde va à l'école et sait ce qu'on doit faire, ce qui est marqué dans le Coran.

Leïla : Moi mes parents ne sont pas pratiquants. Ma mère ne met pas le voile, mes soeurs non plus. Moi je voulais d'abord apprendre à écrire l'arabe, parce que je ne savais pas. Je suis allée à la mosquée du 5ème dans Paris pour des cours. Une amie m'a dit : « viens faire la prière avec moi ». Je lui ai dit « Non. Je ne sais pas les ablutions, je ne sais pas parler la langue, je ne sais pas l'écrire ni la lire. » Elle m'a appris et petit à petit je m'y suis mise. On m'a expliqué que le foulard va avec la prière. Du coup, je l'ai mis et c'est pour moi très important.

MJ: Il y a des femmes musulmanes pratiquantes qui ne portent pas le voile; pourtant elles ont lu aussi le Coran mais elles l'interprètent autrement que vous.

Saïda : Mais le Coran n'a pas à être interprété. Il faut faire comme c'est écrit. Moi j'ai pris le livre toute seule. Mon ex- mari était contre tout cela. Quand je mettais une cassette du Coran, ma belle-mère la coupait en disant « il n'y a pas la mort ici ». (Chez eux on n'écoutait le Coran qu'au moment d'un deuil.) Maintenant on voit des jeunes dans la rue avec le jelbeb et le niqab, pourtant ce sont des jeunes de 17, 18 ans. Je ne crois pas que ce soient les parents ou les maris qui les forcent. Au contraire, je connais des soeurs qui ne mettent le jelbeb que lorsqu'elles sont dehors, parce que les parents ne veulent pas. Il y en a qui ont divorcé, qui ont laissé des familles rien que pour le jelbeb. Certains maris n'acceptent pas ; ils veulent une femme moderne. Eh bien la femme est partie.


Un choix difficile

Saïda : En cas de nécessité, quand on ne peut pas faire autrement, on l'enlève. Mais vraiment il faut qu'on ne puisse pas faire autrement. Il y a des femmes qui l'enlèvent au travail et qui le remettent dès qu'elles sortent dans la rue. Moi, ça je ne le ferais pas. Moi je suis capable de laisser mes enfants, mes parents, rien que pour mon hijab. Pour les autres je ne juge pas. Dieu nous aime tous; à nous de réfléchir un peu.

CF : Pourquoi crois-tu que Dieu te demande cela alors que ça complique tellement la vie ?

Saïda : C'est marqué et ça ne complique pas la vie. Sauf pour les gens qui sont contre l'islam. Si tu m'aimes, tu m'acceptes comme je suis et moi je t'accepte comme tu es. Pourquoi ferait-on la guerre entre nous rien que pour ça ? La France n'est pas un pays « de la guerre ». On peut mettre le hijab, on peut faire les prières et le ramadan. Mais si on était dans un pays où on fait la guerre à l'islam, je ne resterais pas, même si c'était un pays qui se déclare musulman. Mohammed a dit, il faut faire le Hijra et aller dans un pays où l'on peut pratiquer sa religion.

Je respecte ma fille

MJ : Tu es divorcée et tu as une fille qui vit la moitié du temps avec son père et l'autre avec toi. Elle est en âge de porter le voile mais ne le fait pas. Qu'en penses-tu ?

Saïda : Je ne peux pas être violente avec elle et l'obliger. Je fais des douwas, je demande à Dieu qu'elle comprenne un jour. Je lui explique mais je ne la force pas. Je lui dis que le hijab est marqué dans le Coran pour qu'un jour elle ne puisse pas me dire « tu ne m'as pas prévenue ». Je lui dis aussi de faire la prière. Mais je ne suis pas agressive avec elle. Je sais que lorsque tu forces quelqu'un il ne t'écoute pas.

Il faut la laisser évoluer sinon elle se braquera. Et puis, personne n'est 100 pour 100 dans la religion. Quand je fais la prière, je dis à Dieu : « Mon Dieu je ne suis pas sainte, je sais que je fais du mal, pardonne-moi ! » Mais moi, si je pouvais, j'aimerais que ma fille aille dans une école musulmane où elle pourrait porter le voile tout le temps.


L'éducation des filles

Khadidja : Moi, ma fille aînée a quinze ans. Elle suit des cours par correspondance parce que, si elle allait à l'école, elle serait obligée d'enlever son voile. Il y en a beaucoup qui sont inscrits pour les cours par correspondance. On ne l'a pas obligée ; elle est tout à fait d'accord; cela ne l'empêche pas d'avoir des amies. Par exemple, quand « Mes-tissages » fait des sorties pour les jeunes, elle y participe toujours.

MJ: Qu'on s'interroge sur ce que Dieu veut, je comprends. Mais que vous considériez, en lisant le Coran, que Dieu veut non seulement qu'une femme soit voilée mais qu'elle porte cette sorte de voile - là, je ne comprends pas. Le Coran parlait au 7ème siècle et on est au 21ème. Beaucoup de musulmans disent qu'il faut « faire l'ijtihad », c'est-à-dire interpréter.

Leïla : Alors faire l'ijtihad c'est lâcher le Coran ? Si on est dans l'impossibilité par exemple de manger autre chose que du porc, on a le droit de le faire mais juste pour ne pas mourir de faim. Pour la prière, si on est malade, si on ne peut pas la faire debout on peut la faire en s'allongeant. Ce n'est pas rigide.

L'importance de la Sunna

MJ : Il y en a qui disent qu'il faut se laver les dents comme le prophète avec un petit bâton en bois filandreux...?

Leïla : Ce n'est pas le Coran, c'est la sunna. Moi je le fais ; pour moi c'est important. Faire la prière la nuit, en plus des 5 prières, c'est aussi la sunna. Je jeûne lundi et jeudi, sauf si je suis malade, c'est aussi la sunna. Après le ramadan, les 6 jours de jeûne supplémentaires c'est la sunna. Comme le taraoui du mois de ramadan c'est aussi une sunna. Ce n'est pas une obligation, ce n'est pas marqué dans le Coran mais c'est mieux de le faire.

Khadidja : Il y a des musulmans qui disent qu'il faut savoir interpréter et s'ajuster à son époque. Au jour du jugement, ils seront jugés pour n'avoir pas dit comme le Coran. Par exemple, certains disent que le prêt à intérêt est permis. C'est faux. Cela ne se discute pas. Il vaut mieux coucher sous une tente que d'acheter une maison à crédit.

Il y a le Coran mais aussi la sunna, c'est-à-dire le comportement du Prophète. Le mieux, c'est de faire comme lui. Ses premiers compagnons agissaient ainsi: ils imitaient et nous avons, nous aussi, à imiter. On ne peut pas suivre toute la sunna, mais on peut essayer de le faire le plus possible. On se lave les dents comme le Prophète. On dort sur la droite parce que le prophète dormait sur la droite ; on dit bonjour dans un groupe en commençant par la droite parce que le prophète le faisait. Une femme ne serre pas la main d'un homme parce qu'un jour le prophète a dit : « je ne serre pas la main aux femmes ».

CF : C'est étrange, pour un chrétien, ce que vous dites. Dieu ne nous donne pas tous ces impératifs. Même pour le jeûne, Dieu dit : « Le jeûne qui me plaît c'est lorsque vous déliez les chaînes de l'injustice. » Il nous est difficile de comprendre à quel point tous ces ordres et ces modèles sont importants pour vous.

Saïda : Dans le Coran il est écrit que Dieu, avant de créer l'humanité, a créé al kalam, la plume. Celle à qui il a ordonné d'écrire. Mon nom, le vôtre comme celui de n'importe qui est écrit aussi bien en paradis qu'en enfer. Avant que Dieu crée l'humanité, Il a écrit sur une ardoise votre avenir et toute la création. Déjà quand vous êtes dans le ventre de votre mère, au bout du 40ème jour, Allah insuffle l'esprit dans l'embryon pour que l'enfant puisse choisir entre le bien et le mal. Allah a voulu qu'on choisisse nous-mêmes notre voie. Après, quand on meurt, on rend des comptes. Si dans la balance on a fait plus de bien que de mal alors on entre au paradis.


Morale conjugale

CF : Est-ce vous avez des règles aussi par rapport à l'avortement, à la limitation des naissances, au divorce ?

Leïla : On a le droit de divorcer mais avant de le faire il faut beaucoup réfléchir. La femme peut divorcer de l'homme et pas seulement l'homme de la femme. L'avortement est interdit. Mais je connais une fille qui s'est fait violer et a été enceinte. Elle a avorté. Dans des cas extrêmes c'est possible. En Bosnie beaucoup de femmes ont été violées et ont avorté. L'imam les poussait à garder l'enfant mais psychologiquement pour elles c'était impossible. On peut avorter pour des raisons médicales aussi, pour des raisons de vie ou de mort.

Khadidja : Normalement on n'a pas le droit de prendre la pilule mais on a le droit d'espacer les naissances. Pas par la méthode des températures, seulement du retrait. Pour toute autre méthode il faut l'autorisation du mari et il y a des maris qui n'acceptent pas. Il y a des femmes musulmanes qui prennent la pilule mais normalement on n'a pas le droit.

Saïda : Si une femme est malade, elle ne peut pas avoir beaucoup d'enfants, alors il lui est permis d'espacer les naissances. On se met d'accord avec le mari. Mais on n'a pas le droit de refuser des enfants pour des raisons économiques, parce qu'on dit que les enfants sont une bénédiction et qu'Allah pourvoira à leur éducation.

CF : Est-ce que vous êtes d'accord pour la polygamie ? (Mouvement dans la salle qui manifeste une très grande désapprobation.)

Saïda : Presque toutes les femmes sont contre. Moi ? Pas tout à fait. Je ne pense pas à mon sentiment personnel mais à ce que dit Allah. Moi je veux être d'accord avec ce que dit Allah.


Et la polygamie ?

Une femme intervient vigoureusement :

Le Prophète a dit : s'il y a une égalité entre les quatre femmes oui mais seulement s'il y a égalité. Aujourd'hui il y a des hommes qui ont leurs maisons et leurs enfants et après cherchent d'autres femmes. Ils ne suivent pas ce que dit le Prophète, ils suivent leurs envies. Il y en a pas mal qui font ça. Ils sont mariés une fois selon la loi française et une autre fois par Fatiha, ou alors une fois au bled et une fois en France. A la mosquée, on prévient les filles de ne pas se marier selon la Fatiha parce que lorsque les hommes n'ont plus besoin d'elles, ils partent et les laissent sans aucun droit. Ils profitent au nom de l'islam et la fille peut se retrouver seule à élever un enfant.

CF : Pourquoi, Saïda, accepterais-tu que ton mari ait plusieurs femmes ? Parce que c'est la sunna qui le dit ?

Saïda : Moi j'aime bien la sunna.

MJ : Beaucoup de Français pensent que les femmes qui sont habillées comme vous sont prises dans un mouvement politique et qu'elles sont dangereuses.

Khadidja : Nous n'avons rien à voir avec un mouvement politique. Pourquoi dangereuses ? Les medias mélangent tout. On nous prend pour des terroristes alors que nous sommes des gens normaux. C'est des pères de familles qui vont travailler, des mamans qui s'occupent de leur maison et de leurs enfants ; elles ne s'occupent pas du tout de politique.

Saïda : Il y a beaucoup de femmes musulmanes qui sont agressées. Dans le 95, il y a 3 mois, quelqu'un d'un peu fou, dans une voiture rouge, s'est mis à attaquer les soeurs habillées comme moi. Parfois on se fait agresser verbalement dans la rue. On me dit des gros mots. Moi je ne réponds pas. Nous on a peur. Ils parlent de jihad ! Nous quand on prend le bus on n'arrête pas de prier, on demande à Allah de nous protéger.

Le recours à internet

MJ : Le comportement religieux que vous avez adopté, comment l'avez-vous choisi parmi tous les autres comportements possibles pour un musulman ?

Khadidja : Parmi tous ceux qui suivent la sunna et le Coran le mieux possible, certains achètent des livres pour mieux comprendre. D'autres se renseignent sur internet. On connait les savants qui sont sérieux et on va sur leurs sites. On peut poser des questions.

Saïda : On lit aussi le Coran et la Sunna nous-mêmes. On a une raison suffisante pour comprendre ce qui est écrit et pour l'appliquer. Avant je fréquentais beaucoup les mosquées, mais j'ai vu qu'ils disaient n'importe quoi.

Leïla : Mais c'est aussi et surtout une habitude de vie. Tous nos actes sont ponctués ainsi. Par exemple si je me couche sans avoir fait les ablutions, je ne suis pas bien. J'ai oublié quelque chose. Il faut que je le fasse. Les invocations il faut les faire le matin. Ce sont des actes bons, ça ne fait pas de mal. Cela ne dure pas des heures. On ne sait pas ce qui peut arriver. On vit comme si on allait mourir demain. On essaye d'avoir le comportement le meilleur avec la famille, les amis, le voisin. Le voisin, chez nous c'est très important.


Au commencement

MJ : Et vous qui ne dites rien que pensez-vous de cette discussion ?

Une jeune portant un bandana :

Moi j'écoute. Je suis au commencement. Je suis seule à la maison à m'intéresser. Maman ne pratique pas et elle a été à l'école française ; du coup elle n'a pas du tout appris le Coran. Doucement, doucement j'essaye de me former. Quand j'étais plus jeune j'ai dit à des amis « vous avez de la chance de savoir faire la prière ». On m'a dit « tu veux apprendre ? ». J'ai dit « oui » et depuis ce jour là j'essaye de faire la prière. J'ai 23 ans. Ce serait un malheur pour moi de décrocher, même si j'ai des problèmes et que c'est difficile. J'ai fait des études de comptabilité. Je suis auxiliaire de vie, je m'occupe des personnes âgées.

Pour moi, dans l'islam, c'est mon début, même pour les mots, je n'emploie pas le bon vocabulaire. C'est vraiment pour moi dans le coeur. Mais je n'ai personne qui m'explique ; je n'ai que des livres comme celui-là (elle sort un petit livre de sourates du Coran écrites phrase par phrase en arabe, en phonétique et traduites en français). Dans mon cSur j'aimerais beaucoup porter le voile mais je sais que pour l'instant je ne pourrais pas le faire. Si je deviens assidue dans la prière et la religion, là je pourrai le porter. Mais aujourd'hui je crois que je ne mérite pas de le faire. Ce n'est pas encore en rapport avec mon mode de vie. Je pense que si tout le monde était comme mesdames il y aurait moins de problèmes sur terre. Il y aurait moins d'hommes qui tromperaient leur femme, il y aurait moins d'orphelins. Si les femmes étaient voilées, les hommes courraient moins les autres femmes. Ils rentreraient chez eux, offriraient des cadeaux à leur femme et leurs enfants.

Le voile ne dit pas tout !

CF s'adressant aux femmes qui portent le jelbeb : « Vous êtes quand même une minorité à pratiquer cet islam? »

Saïda : Il y en a beaucoup qui portent le voile mais certaines ne font même pas la prière. Certaines le prennent simplement comme un habit. J'en connais une qui porte le même voile que moi et qui ne fait pas la prière. Quand je lui demande pourquoi elle me dit « je me sens bien comme ça ». Le voile ne dit pas tout !

MJ : Est-ce que vous considérez que vous êtes salafistes ?

Khadidja : Oui.

Saïda : Les salafistes ce sont les gens qui suivent vraiment le Coran et la Sunna et qui ne font pas du tout de mal. Les gens qui parlent à la télévision des salafistes djihadistes, ça n'a rien à voir avec nous. C'est politique. Cela n'a rien à voir avec celui qui a le jelbeb. Je suis salafiste dans le sens que je suis la sunna. Ou plutôt je voudrais bien l'être parce que je ne suis pas capable de tout suivre ! En tout cas, les salafistes - les vrais - sont des gens qui ne mentent pas, qui ne racontent pas n'importe quoi, qui essayent de suivre vraiment la religion à la lettre. Ils vivent pour Dieu et non pas pour se faire voir.



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