Le Père Michel Lelong est Père Blanc.
Avant d’être responsable du Service des Relations avec l’Islam il dirigeait l’IBLA (Institut des Belles Lettres Africaines). Aujourd’hui en retraite, ce pionnier du dialogue islamochrétien en France demeure en contact avec beaucoup de personnalités musulmanes qui lui font confiance.
Dans les semaines qui suivirent les attentats du 13 novembre 2015 à Paris nombreuses furent, dans notre pays, les voix qui s’élevèrent pour appeler à l’union nationale et au « vivre ensemble » dans la fidélité aux valeurs de la France. Mais dans certains milieux politiques, culturels, médiatiques et même ecclésiastiques, s’élevèrent aussi des voix prétendant que « l’islam est un péril pour la civilisation européenne », que « les musulmans sont incapables d’accepter la laïcité » et qu’« il y a trop de mosquées dans notre pays ».
Ceux qui tiennent un tel langage semblent ignorer que dans certaines régions du monde, en particulier au Maghreb et au Moyen-Orient, ce sont des Musulmans qui sont les plus nombreuses victimes du terrorisme. Ils semblent ignorer aussi qu’il existe depuis longtemps et de plus en plus dans l’Umma, des courants de pensée divers en ce qui concerne l’interprétation du Coran. Ils oublient enfin qu’en France, comme en beaucoup d’autres pays, de Rabat à Alger et Tunis, du Caire à Beyrouth, Damas et Téhéran, tous les principaux responsables et porte-parole de l’Islam ont vigoureusement condamné le comportement de ceux qui utilisent le Coran et le trahissent en se laissant aller au fanatisme et en commettant des crimes.
Heureusement, dans notre pays, avant et après les évènements du 13 novembre, les plus hautes autorités politiques ont clairement rappelé que la laïcité bien comprise n’est pas hostile aux religions, mais qu’elle les respecte toutes et qu’elle permet à tous les Français – qu’ils soient Chrétiens, Juifs ou Musulmans, qu’ils soient croyants ou incroyants – d’avoir les mêmes droits et les mêmes devoirs. Tel est le message qu’a souvent rappelé, ces derniers mois, le Ministre de l’Intérieur, M. Bernard Cazeneuve.
De son côté, la Conférence des évêques de France appelle, depuis longtemps déjà, les Catholiques de notre pays à établir et à approfondir avec les Musulmans des relations d’amitié fraternelle er de confiante coopération pour promouvoir la justice et la paix. Elle le fait en particulier grâce à l’action menée par le Secrétariat pour les relations avec l’Islam (SRI) devenu récemment le Service National pour les Relations avec les Musulmans (SNRM).
Dans les siècles passés, en France, les relations entre l’Eglise catholique et la République laïque furent souvent difficiles et parfois même conflictuelles. Elles sont maintenant apaisées et bénéfiques pour tous. Je suis convaincu qu’il en sera bientôt de même entre l’Etat et l’Islam, dans notre pays, même si la présence des Musulmans y est récente et donc beaucoup moins visible et moins influente dans la vie sociale et culturelle, marquée chez nous depuis des siècles par la foi et la tradition catholiques : pensons à toutes les cathédrales dans nos grandes villes, au clocher de l’église au cœur de tous nos villages, et aux fêtes de Noël, de Pâques, de la Toussaint, célébrées par tous les Français.
Qu’ils soient Catholiques, Orthodoxes ou Protestants, les Chrétiens de France peuvent et doivent, en ce début du XXIème siècle, apporter leur soutien aux efforts réalisés pour que notre pays soit vraiment exemplaire dans le domaine des relations interreligieuses. A cette tâche, participent de nombreuses institutions et associations qui font du bon et beau travail. Qu’il me soit permis ici de citer le Groupe d’Amitié islamochrétienne (GAIC) à la création duquel Michel Jondot apporta une précieuse contribution. Tout en s’efforçant de favoriser le « vivre ensemble » dans notre société française, le GAIC pense aussi aux responsabilités internationales de la France. Il appelle tous les croyants à unir leurs efforts pour promouvoir ensemble – et avec tous, croyants ou non – la justice et la paix sur la terre où naquit le Christ et où, depuis trop longtemps, une injustice majeure est faite au peuple palestinien.
Comme le disait Benoît XVI à Rome le 25 septembre 2006, « le dialogue interreligieux et interculturel est une nécessité pour construire ensemble le monde de paix et de fraternité souhaité par tous les hommes de bonne volonté. » C’est le message que le pape François a rappelé lors de son récent voyage en Afrique. C’est aussi celui que n’ont cessé de rappeler ensemble, ces dernières années, les responsables religieux Chrétiens et Musulmans, au Liban, en Syrie, en Palestine. Saurons-nous entendre leurs voix et répondre à leurs appels ?
Michel Lelong, Père blanc.