Un tournant dans l'histoire de l'humanité
Pierre et Maïta Lucot
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Confrontés à la question de leur survie,
les hommes sont appelés à inventer une solidarité
qui prend en compte la condition faite aux plus démunis.
Pierre et Maïta nous livrent un témoignage.
Leur analyse et leur engagement donnent à espérer que,
face aux dangers qui menacent la planète,
on inventera un monde où les relations entre les hommes
sont plus importantes qu’une croissance infinie.


Une menace pour l'humanité

Le développement récent de nos sociétés, celui des « trente glorieuses », s’il a permis à une partie importante de la population de bénéficier d’une amélioration de son niveau de vie, de libérer certains de travaux physiquement pénibles grâce notamment à la mécanisation, en est arrivé à une échéance qui nécessite la remise en question de sa poursuite.

L’exploitation intensive des ressources naturelles fossiles qui a permis le développement exceptionnel de nos civilisations, a parallèlement vu, en deux siècles, la population mondiale se multiplier par dix.

Ainsi pour la première fois dans l’humanité se pose la réalité de la limite de notre planète et de ses ressources. Les capacités de régénération de la biosphère ont été dépassées d’un tiers, l’humanité dans sa globalité vit au dessus des moyens de la planète dans cette même proportion.

Dans une société dite d’abondance, la misère et l’injustice perdurent, ce système de développement est devant l’échec toujours croissant du milliard d’individus souffrant de la faim. Les ressources fossiles, limitées car provenant d’un processus de composition millénaire, s’épuisent; leur rareté devient de plus en plus tangible, menaçant un système économique reposant sur leur faible coût. La biodiversité, qui constitue la chaîne complexe du monde vivant dans laquelle chaque maillon conditionne la survie d’un autre, est fragilisée ; nous assistons à une extinction des espèces animales et végétales sans précédent. Le climat enfin, victime de ce développement inédit, est en voie de dérégulation dont nous sommes aujourd’hui incapables de mesurer l’ampleur, tout en sachant que celle-ci peut menacer l’existence même de l’humanité.



Un modèle de développement dangereux

Pour la première fois l’humanité dans sa globalité est confrontée à la question de sa survie qui interroge de façon radicale le système productiviste qui est à l’origine de sa nouvelle fragilité.
Pour la première fois le modèle de développement issu de l’exploitation des ressources naturelles et des hommes n’est plus un idéal mais une menace pour tous.
Pour la première fois ces questions reposent sur un constat inédit : l’humanité ne pourra trouver une issue à sa survie que si elle remet radicalement en question ses modes de production et de consommation.
Pour la première fois une réponse nécessite une action qui dépasse les limites abstraites des frontières, mettant chaque homme en solidarité en regard du devenir de toute l’humanité.
Pour la première fois la responsabilité individuelle est à la fois nécessaire et insuffisante.
Pour la première fois l’homme peut considérer que seule une démarche solidaire prenant prioritairement en compte le sort des plus démunis et reconsidérant celui des plus favorisés sera capable d’initier la nécessaire prise en compte du bien de tous.

Certes la responsabilité de chacun, ses moyens d’action sont différents et peuvent se mesurer au regard de l’empreinte écologique que chaque homme a sur notre planète et qui n’est que l’illustration de l’inégalité sur laquelle repose ce système d’exploitation qui accepte que perdure la souffrance de la faim pour un milliard d’humains.
Des 9,5 hectares nécessaires à l’Américain, aux 0,9 hectares de l’Indien, l’effort n’est pas le même pour atteindre les 1,8 hectares par habitant que nous autorisent les limites de la planète. Il semble paradoxalement beaucoup plus difficile à atteindre dans un sens que dans l’autre. S’attaquer à l’excès semble en effet plus douloureux que de s’attaquer au manque. L’abondance ne peut souffrir d’autre modèle que le sien, le remettre en cause par une volonté naturelle de justice et d’équité serait s’attaquer aux principes mêmes qui fondent la société de l’opulence pour les uns et de la misère pour les autres.

Comment alors ne pas s’interroger sur le sens de nos actes et ne pas apprécier notre capacité de réaction ?
Comment ne pas entrer en résistance pour défier le « vous saviez et vous n’avez rien fait » qui pèse sur l’histoire de toute une génération, alors que l’enjeu est celui de notre survie et que perdurent les morts par la faim? Comment ne pas vivre plus que jamais l’urgente nécessité offerte à tout homme libre de s’engager alors que les raisons de le faire sont si nombreuses ?

Les réticences à l'action


La « défense des acquis » est une première raison à cette réticence à la réaction. La peur d’un retour en arrière, d’une remise en question d’un nouveau confort est en effet inacceptable pour les enfants d’une paysannerie souffrante ou d’une classe ouvrière exploitée.
Pour d’autres, l’illusion d’une issue technologique, la croyance aveugle dans les capacités d’adaptation de l’homme devant toute situation, apporte une réponse rassurante bien que reposant sur un déni devant une réalité dont ils se refusent à mesurer l’ampleur.
D’autres enfin, asservis par une organisation qui les déresponsabilise, par des statuts précaires qui les fragilisent, sont contraints de se soucier au court terme de leur survie ou du maintien de leur relatif bien-être. C’est l’aveu d’impuissance et la peur d’une réalité dépassant les limites que leur impose la perte de leur liberté, qui les contraint à la passivité.

Arc-boutée sur ses valeurs de développement et de croissance, l’idéologie dominante entretient ces résignations pour que perdure sa domination. Elle persiste à maintenir l’illusion qu’une croissance infinie dans un monde fini soit possible. Faisant fi des laissés pour compte, l’oligarchie aux commandes se pose en modèle « peopolisé » avec l’appui de ses principaux moteurs : le crédit, la virtualisation du vivant, la publicité et l’obsolescence de ses produits de consommation.

Devant ce constat, l’écologie propose une issue désirable.
L’homme, en fondant l’essence de ses valeurs sur la domination de la nature, a peu à peu oublié qu’il en était totalement dépendant, que ses racines étaient terriennes. Cette radicalité étymologique situe l’humanité dans les fondements de son origine et de ses valeurs.

La nature et autrui : une double dépendance

Ces valeurs sont « naturelles » au sens ou elles sont partagées par ce qui fonde la vie : la solidarité, l’empathie, la diversité, la temporalité nécessaire à la régénérescence, le respect des biens communs que sont l’eau, l’air, la biodiversité, les ressources naturelles, sont aujourd’hui reconnues comme des valeurs universelles partagées par le monde vivant. Elles sont indispensables aux conditions même de la vie.
Ce respect, cette acceptation de cette dépendance envers la nature comme envers les autres hommes est l’essence de l’humanité car elle est l’expression de son humilité devant ce qui lui donne vie.

Cette incitation au partage, cette apologie de la simplicité choisie, cette recherche de cohérence intérieure entre ses pensées et ses actes est au coeur de nombreuses démarches spirituelles ou religieuse. Elle prend aujourd’hui un sens historique revêtant le caractère d’une impérative nécessité.

Le message de l’écologie prend ainsi une dimension spirituelle. Il s’exprime dans la liberté de faire le choix de cette nécessité, de le rendre désirable en rappelant son caractère fondamentalement humain. En ce sens l’écologie pourrait être appelée à être une nouvelle démarche spirituelle.


L'écologie : une démarche spirituelle

Cette perspective désirable est faite d’humilité et de partage, à l’image des mouvements citoyens se revendiquant de cette écologie « radicale » et qui se construisent autour de la « simplicité volontaire », de « l’objection de croissance », de la relocalisation des échanges, de la valorisation des savoir faire et d’une autre temporalité.
Elle prône une utopie plus réaliste que celle de la croissance infinie. Elle rejette les marchands du «temple-terre», et prône les économies du don et de l’échange autour du mot d’ordre suivant : « moins de biens, plus de liens ».

Ne plus gagner sa vie, mais donner sens à son activité et aux échanges humains qu’elle procure, mieux se nourrir en redonnant sa valeur aux éléments naturels qui constituent notre nourriture, mieux se déplacer en valorisant la qualité des relations de proximité et la temporalité du voyage,... ces choix désirables ont une universalité qui dépasse l’écologie. Partagés dans une recherche de cohérence spirituelle, ils se proposent comme une alternative avant que d’autres conditions de survie moins désirables ne nous soient imposées.
Le projet de l’écologie, qui est celui de la prise en compte globale du vivant en tant que valeur fondamentale, et qui replace l’activité humaine dans sa temporalité naturelle est profondément humaniste.

Il s’inscrit dans une démarche philosophique de responsabilité: ne pas faire parce que l’on peut ou que l’on est en capacité de faire, mais peser son action au regard de sa finalité. C’est cette absence de responsabilité qui a permis qu’existent le nucléaire militaire et civil, les OGM, les nanotechnologies, tout ce qui fonde le dogme du progrès imposé et qui menace l’avenir de l’humanité.

Ce principe de responsabilité est la base du sens que l’homme né libre est en devoir de donner à tout choix qui se présente à lui. C’est la raison d’être de sa liberté, c’est la condition de sa spiritualité.

Pierre et Maïta LUCOT
Mouvement UTOPIA




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