Croyez-vous en l'Au-delà ?
Danièle et Zhora
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La même question a été posée à Danièle, la Chrétienne, et à Zohra la musulmane


Danièle, la chrétienne

Chaque peuple, chaque société a sa vision de l’Au-delà. On la forme et on la modifie selon les nouvelles valeurs qu’on adopte. Chaque individu et chaque croyant change de vision ou de conception avec l’âge, au gré des expériences et en fonction de l’extension des connaissances. Pour ma part, je ne crois pas m’être jamais fait une ferme vision de l’Au-delà. (Ce terme est prudent : il évite la trop grande précision du paradis.)

Comment, du reste, avoir l’outrecuidance d’évoquer avec précision un « au-delà » qu’on ne peut avoir jamais vu ? Les expériences de ceux qui ont frôlé la mort et qui sont revenus, parlent de lumière, de grande joie : un état indicible ! Mais cette approche n’est qu’une approche.

Nous avons les Évangiles ; les paraboles de Jésus sont des paraboles : giron d’Abraham, flammes où se retrouve le riche qui se retrouve assoiffé… Ce ne sont pas des descriptions. La réponse au bon larron est réconfortante - ô combien ! - mais sans précision. Qu’espérer donc, en définitive ? Une immense joie, différente de tout ce qu’on peut imaginer, ou bien « pleurs et grincements de dents » pour ceux qui, comme les vierges folles, ont négligé de mettre assez d’huile dans leur lampe ? Franchement, je n’en ai pas d’idée et surtout je ne cherche pas à m’en forger une.

Est-ce à dire que je pense, comme il est dit dans l’Ancien testament, que la vertu ou la bonne action est en elle-même sa propre récompense ? On peut dire que « c’est déjà ça ». C’est même assez joli « ça » ! A condition que ce ne soit ni pétri ni saupoudré d’orgueil mais que ce soit le sentiment qu’on est dans le droit fil de la vie, qu’on a fait simplement ce qu’on devait. Et ce « droit fil » (j’aime cette expression, sans doute du fait que ma mère était couturière) - c’est-à-dire les lignes de force conductrices de la vie (notre vie et celle des autres) – que l’on ne perçoit pas toujours, aveuglés que nous sommes par les événements de chaque jour, ce « droit fil » n’est-il pas déjà une sorte d’au-delà ? Il dessine, en effet, une vie différente de celle que nous connaissons chaque jour.

J’ai eu une expérience qu’on appelle, faute de terme adéquat, « océanique ». Cela fut bref mais cela m’a paru long. Pour de mauvaises raisons je venais de m’être sentie humiliée, anéantie – au sens fort. J’ai prié la Sainte Vierge de me sortir de cet état puisque je ne pouvais plus servir à rien. Et doucement, lentement, la paix est revenue. Une paix invincible m’a remplie : une douceur d’une force inépuisable, l’impression très nette que ma grand-mère était présente toute proche de moi. Et quand, lentement encore, cela s’est dissous sans laisser le moindre regret ou la moindre amertume pour me laisser disponible à mes tâches, j’ai compris ce que voulait dire « recevoir une mesure comble » (je ne me souviens plus bien des mots exacts dans l’Evangile). J’avais juste demandé d’être remise dans mon état normal et j’avais reçu bien au-delà de ce que j’aurais pu espérer.

Sans la voir ni l’entendre, j’avais eu le sentiment que ma grand-mère était là, toute proche alors que je l’avais peu connue et que j’en avais peu de souvenirs et je n’avais pensé à elle ni ce jour-là ni les jours précédents. Si cette impression n’était due qu’à une cellule nerveuse enfouie dans ma mémoire et revenue à la surface comme une bulle – ainsi diraient les mécréants -, reste qu’elle est arrivée comme la providence, au moment qu’il fallait.

Danièle


Zhora, la musulmane

Oui, je crois en l’Au-delà. J’en parle à mes enfants (Mustapha, 12 ans et Sabrina 9 ans). Quand ils mentent, je leur rappelle ce que c’est qu’un gros péché et ce qu’il ne faut pas faire si l’on veut aller au paradis.

Je crois que ceux que j’ai connus ont paru devant Dieu. Souvent, quand je suis seule et presque sans le vouloir, je pense à eux. Mon père est mort quand j’étais bébé ; je ne l’ai pas connu et j’ai des remords de ne pas beaucoup penser à lui. Mais quand j’étais enfant, je passais mes vacances chez mes grands-parents qui sont morts. Je me dis : « que sont-ils devenus ? » Mon grand-père n’est pas allé à La Mecque et il ne faisait pas la prière. Je m’inquiète pour lui. J’essaie de prier Dieu pour qu’il lui soit fait miséricorde.

Ce n’est pas mon cas mais j’entends parler de « visions » autour de moi. Par exemple ma mère avait perdu deux bébés en très bas-âge, un garçon d’abord, une fille ensuite. Ma mère n’a pas du tout supporté le deuxième décès et elle n’arrêtait pas de pleurer. Elle m’a raconté qu’elle avait alors vu sa fille qui allait être dévorée par les flammes et qui lui a dit : « C’est à cause de tes larmes que je suis menacée. » Le Seigneur nous demande de ne pas trop pleurer le départ de nos proches. Après cela ma mère a accepté de faire son deuil. Beaucoup voient leurs proches défunts venir à eux dans leurs rêves : ils sont beaux, vêtus de blanc, le visage éclairé.

Parce que je crois à l’Au-delà, je fais des « sadaqa ». Ce sont des dons qu’il faut faire en secret avec des intentions précises. Par exemple, pendant les jours de grosse chaleur, je mettais une bouteille d’eau à la porte de la mosquée pour que les sans-abris puissent se désaltérer. En faisant la sadaqa, je disais « C’est pour mon grand-père ou pour tel ou tel autre ». Il faut parler aussi des hasannat ; ce sont des gestes tout simples qu’on accomplit pour rendre la vie d’autrui plus agréable. Par exemple, on sourit à un voisin quand on le rencontre ou on ramasse une peau de banane pour éviter que quelqu’un tombe en marchant dessus. En posant ces gestes, en secret on dit à Dieu : « C’est pour un tel. »

Oui, je crois en l’Au-delà mais je ne sais pas ce que c’est que le ciel. En croyant à l’Au-delà je me confie à la miséricorde de mon Seigneur.

Zhora
Pastels de Noëlle Herrenschmidt


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